Isabelle Maurau, intervenante sociale dans une maison d'hébergement, nous parle du parrainage et de son impact sur les enfants/jeunes du pavillon où elle travaille.
Merci pour son témoignage!
1) Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ainsi que votre rôle au sein de la
maison d’hébergement où vous travaillez?
Je suis Isabelle Maurau. Je suis intervenante sociale dans une institution pour enfants, entre 6 et 12 ans, qui présentent des troubles du comportement. Nous avons 2 groupes de 20 enfants divisés en 2 sous-groupes ( Les Narnias et le Griffondors). Chaque groupe a son espace de vie composé d’une table, chaises, fauteuils, une télévision. Il y a également une pièce « cocoon » où les enfants peuvent aller se calmer en s’isolant du groupe. Les plus jeunes dorment dans un dortoir. Ils ont chacun un « coin chambre » avec une table de nuit et une petite armoire. Il y a également une salle de jeu dans laquelle se trouve un kicker.
Nous les accompagnons au niveau de leur socialisation, autonomisation, scolarité. Nous proposons des « espaces thérapeutiques » pour les jeunes et nous collaborons, selon les situations familiales, avec les parents. Notre concept de travail est la systémie familiale.
Mon rôle, en duo avec l’intervenant psychologue, est d’animer les entretiens avec le réseau familial ou individuel avec les jeunes, maintenir le contact avec le réseau du jeune : les mandants, familles de parrainage, activités sportives, mouvements de jeunesses, camps externes, autres institutions dans le cas de fratrie, rencontres fratries, rencontres encadrées. Je participe également à la rédaction de divers documents, l’organisation des plannings…
2) Dans quel cadre/contexte envisagez-vous un parrainage pour un enfant ?
Nous élaborons en équipe le projet de famille de parrainage dans le cadre d’enfants qui ont peu ou pas de ressources familiales directes ou élargies et, certainement, dans le cas d’interdiction de contacts avec les parents ou de déchéance d’un ou des parents.
Ce sont souvent des jeunes qui sont placés sur du long terme et qui sortent peu de l’institution pendant les week-ends ou les vacances.
Ce projet ne peut être envisageable que si celui-ci peut s’inscrire positivement par rapport aux difficultés de l’enfant (trouble de l’attachement, loyauté à sa famille…).
3) Avec l’expérience, en quelques mots, observez-vous un impact du parrainage sur le jeune (comportement, évolution, lien avec les autres, etc)
Nous pouvons observer que nous sommes dans une bonne tranche d’âge pour construire un projet de famille de parrainage.
Les impacts de la « bulle d’oxygène » que les jeunes vivent en famille de parrainage est notable à plusieurs niveaux : apaisement dans le groupe, bonheur de découvrir d’autres activités, d’autres modes de vie, présence d’adultes « rien que pour eux ».
4) Que représentent, généralement, les parrains/marraines pour les jeunes accueillis au sein de la maison d’hébergement?
Le plus important est que les familles de parrainage représentent des petits moments familiaux en dehors de l’institution. Ce sont également des moments « d’individualité » avec des adultes ou autres enfants dont ils profitent peu à l’institution. Les parrains/marraines sont également des « modèles » classiques de vie familiale. Quand la confiance s’installe, ils peuvent devenir des confidents pour le jeune.
Les moments de parrainage sont des moments de détente, de jeux, de satisfactions différentes de celles des institutions à différents niveaux : nourriture, jeux électroniques, activités spéciales, fêtes familiales, achats…
Les parrains/marraines représentent également le lien /la relation stable à plusieurs niveaux. Dans la fréquence mais aussi au niveau de la qualité du lien. En effet, nos jeunes proviennent pour beaucoup de familles dont la qualité du lien fluctue en fonction des émotions du moment et de la gestion de celles-ci.
5) Pensez-vous que le parrainage peut avoir des effets bénéfiques sur du long terme ?
J’en suis persuadée dans le sens où c’est une relation stable et durable. Les parrains/marraines peuvent également devenir des tuteurs de résilience car ils représentent « l’extérieur » d’une institution et, par conséquent, un mode de vie plus proche de quelque chose de « la normalité ». S’il y a une bonne distance relationnelle, la relation peut être juste et saine car il s’y crée un lien affectif sans les enjeux émotionnels compliqués des liens parentaux.
6) Comment voyez-vous l’utilité/ le sens du service Parrain-Ami dans le suivi des
parrainages ?
Parrain-Ami fait tiers dans les situations. L’ASBL vient avec sa propre structure ce qui permet de définir un cadre précis. Cela permet à l’institution de s’y référer en cas de demandes qui sortent des accords de base.
Parrain-Ami collabore avec les familles de parrainage et l’institution avec les familles biologiques et le réseau du jeune. Cette distinction est importante pour éviter les confusions au niveau des relations et du travail avec les familles.
Parrain-Ami a sa propre structure de « recrutement » des futur(e)s parrains/marraines que nous n’avons pas et qui assure les meilleures possibilités de « matchs » entre les jeunes et les parrains/marraines.
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